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Choix de poèmes

 

Je considère la poésie à la fois comme une arme et comme une femme. Je me sers d'elle pour fustiger ce que le monde des hommes a de laid et d'odieux. Elle se sert de moi comme si je n'étais qu'une sorte d'épicerie sentimentale. Ensemble l'un et l'autre, nous avons perdu beaucoup de temps magique où ce n'est pas une extravagance de s'affaler d'amour ou de joie dans les foins. Ensemble, nous avons vécu comme des maisons sans fenêtres. Je ne regrette pas ce temps perdu à me façonner une âme. Seul l'orgueil qu'elle m'a donné me gêne parfois; car nous finissons par nous croire plus grand que nature.

 

Pierre Béarn

 

USINE DE CAMPAGNE

 

Usine ourlant de laideur grise un champ de blé

Si honteuse en sa logique

de dresser là ses murs de briques

qu’on la prendrait pour un grand vaisseau naufragé.

 

Sa cheminée trop haute et qui semble vétuste

distille une fumée d’hiver

que le vent aussitôt conquiert

pour tracer dans le ciel un fin chemin d’arbustes.

 

Le lierre et les orties cernent ses alentours

et la mousse attendrit ses tuiles

pour leur donner un air fertile

de jachère attendant l’époque des labours.

 

Mais dans l’été qui dort son haleine est trop forte

pour les papillons audacieux

et les blés ont pris l’air soucieux

des arbres quand ils voient tomber leurs feuilles mortes.

 

 

TAYLORISME

 

La chaîne cliquette en dépliant ses vertèbres

Cloc ! l’homme assis serre un écrou

Cloc ! cloc ! et l’écrou fait glou-glou

telles des gouttes d’eau tombant dans les ténèbres

 

Cloc, cloc, glou, glou, cloc, cloc, la chaîne se déploie

cueillant au vol le geste à faire

pour que l’écrou héréditaire

saute sur le boulon qu’on lui promet en proie

 

Les têtes des chaîneux morts à la vie qui passe stagnent

dans l’eau des projecteurs

Cloc ! l’une en fugue de torpeur

soudain glisse sur les écrous qui se prélassent…

 

Mais le voisin qui pose un écrou virginal

ne voit pas venir cette tête

flottant en bouteille distraite

sur le flot nonchalant du travail machinal

 

Et bientôt débordé par le courant pervers

qui trouble l’ordre lumineux

et fauche en passant les chaîneux

voici que glisse aussi sa tête et qu’il la perd

 

Cloc, cloc, glou, glou, cloc, cloc, le massacre dolent

des figurants de cette foire

met sur le lit circulatoire

les têtes moissonnées du décapitement

 

Et quand le contremaître ayant atteint le bout

se retourne enfin vers la chaîne

il découvre miton mitaine

un régiment de mains torturant les écrous.

 

 

PAYSAGES MARINS

 

Quand mon bateau sème en paix sa fumée

sur la mer qui n’a plus d’âge

et que le vent s’amuse à feuilleter ma vie

j’aime à rêver sur le gaillard d’avant

bordé par un nid de cordages.

 

Le chant de l’eau courant l’étrave

fait renaître celui des sources.

Dans la mer atténuée du ciel

les nuages sont des banquises

à la recherche des eaux tièdes.

 

Je me sens revenu vers les miracles

des premiers regards…

Les gamines de mon enfance

font fleurir en moi leur mystère,

la mer oubliée sur la plage

berce mes bateaux de papier

et je nie qu’un plaisir soit doublé d’héritage.

Autour de mon repos la mer est costumée

des soies bruissantes de l’été

et la brise apporte avec elle

le frisson chantant des forêts.

 

Si je ferme les yeux sous la tombée des feuilles

le pont ne sera plus qu’un radeau suspendu

que la main de la brise balance.

 

Mais qui pourrait aimer ces images paisibles

sans avoir entendu dans la hargne du vent

hurler en soi la peur ?

 

* * *

 

Par-delà l’horizon mouillé

sous la tente bleutée du ciel

les élans frileux de l’automne

font la récolte de l’été

et dans les arbres dépouillés

qui ne sont plus que des perchoirs

tous les oiseaux devenus noirs

se multiplient en fruits brûlés.

 

Sur les champs rasés de leurs blés

l’herbe folle s’élance et danse !

La mousse étend sa tendresse

en mantelets douillets

sur le deuil des arbres.

 

Doux et charmant automne

étouffant gentiment la sève.

 

C’était l’époque où mon aimée

revenait en ma vie

elle attendait que sur l’été

l’automne jetât son manteau d’or

mais les premiers froids l’emportaient.

 

Sous la tente bleutée du ciel

mon bateau continue sa route

vers l’hiver en marche.

Le pont n’est plus ce radeau suspendu

que la main de la brise balance.

La mer est un désert vivant

et c’est vainement que j’ai reposé ma fatigue.

 

 

NEGRO SPIRITUAL

 

Nous sommes la nuit des faces noires

en marche vers la lumière

la nuit des faces noires

qui montent vers l’aurore

Nous sommes les affamés

du soleil de la liberté.

 

Nous tendons nos mains enchaînées

vers la levée des roses

Nous tendons nos mains couleur de lune

vers le paradis des roses

nos mains de nègres

vers la saignée de l’espoir.

 

Nous cernons le bonheur des hommes

qui se sont emparés du soleil

Nous cernons le bonheur lumineux des hommes

dont la liberté nous néglige.

 

Nous voulons goûter au bonheur

de la lumière des hommes dans la joie

Nous voulons marcher dans la lumière

des hommes lumineux de joie

Et que soit oubliée la nuit de nos visages.

 

Nous voulons que la nuit de nos coeurs

se dissipe

et que devienne lumineux

notre corps

Nous voulons que s’illumine dans la joie

notre corps de douleur

Notre corps semblable au vôtre.

 

 

LA NÉGRITUDE

 

Je suis le nègre

qui courait avec les marigots

vers les vaisseaux en grandes mâchoires d’espoir

 

Je suis le nègre

chahuté par l’océan qui menait

à la Nouvelle Orléans des mains blanches

en 1619

 

Et je suis aussi le nègre

de la colère du vent libre

sur les fantômes de poussière de Washington !

 

Je suis le nègre au coeur pilé dans les mortiers

où se rythme l’absence écrasée dans les grains

 

Et je suis aussi le nègre au sang meurtri

qui s’évade en clameurs !

car il est toujours prisonnier.

 

Mais aujourd’hui me voici devenu

l’esclave débordant du Mississipi

vers les nourritures des élus de Dieu

 

Je ris

de les voir trembler du silence

de nos troupeaux d’hommes

 

Et je viens piétiner leur peur à Congo Square !

 

Je suis le nègre de Storyville

et je fais du bruit pour oublier.

 

 

QUE SUIS-JE ?

 

Je ne veux pas choisir

entre ceux qui vécurent

dans l‘imagerie des frontons

et ceux qui s’illuminent en révolte

drapés de couleurs arrogantes.

 

Je ne veux pas choisir

entre ceux qui condamnent

et ceux qui sont condamnés

car ne sont-ils pas tour à tour

innocents et coupables ?

victimes et bourreaux ?

 

Je ne veux pas choisir entre les vérités

façonnées d’illusions étant nées du langage.

 

Je ne veux pas trancher du juste et de l’injuste.

 

Je ne sais plus ce qui est bien

ce qui est mal

dans les fornications de l’orgueil

et du désir de vaincre.

 

La victoire a toujours raison.

 

Je ne voudrais connaître

que la vérité du sang

et son poids de honte dans l’absurde,

son poids d’impuissance,

son poids de désespoir

pour mieux crier mon désaccord

et pour que hurle ma souffrance.

 

Je me sens nègre et chinois

mongol et breton

et français tout ensemble

 

La couleur des drapeaux

toujours outrée

me rend aveugle et fou.

 

Je me veux libéré des couleurs

et de leurs frontières.

 

L’Humanité ?

je la porte en moi dans mon sang.

Les hommes ?

quelle affreuse imperfection.

 

Des méprisants vieillards de l’élite,

aux jeunes loups la haine aux dents

Tous dressés les uns contre les autres

en appétit que rien ne peut calmer

 

Tous promis à la vermine

qui les fera tous égaux.

 

Et les voilà

fourmis ailées lancées

à la conquête de l’espace

décrété terre des hommes

 

La Lune était un croissant pour votre faim

mangez-la !

La Terre n’en restera pas moins un caillou

perdu dans l’univers hydrocéphale.

La Terre n’est qu’une puce dans l’infini.

 

Politiques de la discorde je vous déteste !

 

Ambitieuses machinations de l’ombre

au détriment de la lumière,

dénigrements organisés,

verbiages peinturlurés du Mensonge,

équilibres de bulles de savon,

maladies honteuses du Pouvoir,

je vous méprise en bloc.

Je ne veux pas choisir entre vos uniformes

vos religions utilitaires

vos imageries historiques

vos justices nourries de vengeances.

 

Dans l’absurdité des confrontations

un soldat vaut un soldat

et tous les dieux se ressemblent.

 

La Justice est un ciel que vous profanez.

 

Je ne veux pas choisir

entre le contremaître

que condamne sa réussite

à n’être plus revendicateur en France

et l’ouvrier de Leningrad

qui devint commissaire du peuple

en Ukraine.

 

Je ne veux pas choisir

entre les tribus, les peuples,

les langues, les nations,

les façons de vivre.

 

La Droite, la Gauche, le Centre.

Et pas davantage les extrêmes.

 

Je veux rester libre de vivre

à la lumière de mon coeur

seul, s’il le faut

et les mains vides

rêvant à l’Humanité sauvée

des langages.

 

Passantes - 139e

 

C’était l’époque où dans le vent

les feuilles mortes en tombant

ont des plaintes d’agonisants…

 

J’avais une canne de rêve

et je cherchais ma Geneviève

comme un arbre cherche sa sève,

 

Le vent poussait vers moi la nuit

et sur les abords de minuit

ma faim put s’emparer du fruit.

 

Un fruit naissant parmi la mousse

telle une oasis dans la brousse,

un joyau noir hors de sa housse.

 

Mais l’automne avait des regrets

de perdre ainsi son alphabet.

La nuit referma son coffret.

 

C’était l’époque où dans le vent

j’avais trouvé ma Geneviève

sans pouvoir me saisir du fruit

qui aurait clos mon alphabet.

 

Les feuilles mortes en tombant

ont des plaintes d’agonisant.

 

 

Sans consistance

Femmes de ma tendresse évadées

Femmes qui restez des proies

mais n’êtes plus pour mon désir

qu’inaccessibles damnations

je me vieillis de vous

 

Femmes dont les formes parlent

un langage qui me veut sourd

Femmes dont le dédain fait ma faillite

Femmes accumulées dans mes silences

et dont la flamme brûle en moi

je me vieillis de vous

 

Graines qui ne naîtrez plus de mes mains

et dont les moissons m’échappent

Aurores dont l’indifférence m’ouvre la nuit

et qui mourrez impénétrées

ou mal serties

Aurores qui ne vivrez plus de ma lumière

je me vieillis de vous

 

Femmes avares gonflées de dons

Généreuses dont les mains sont prisonnières

d’une vertu ou d’un devoir

Femmes en marche vers d’autres hommes

et que le viol de mon regard

ne trouble plus

je me vieillis de vous

 

Femmes emportées sur des cycles

qui prenez le vent pour amant

Femmes dont les cheveux sont des sillages

me voici pour vous devenu

le fantôme d’un homme

je me vieillis de vous.

 

 

Précédé d’ombres

 

En souvenir de Pierre Véry

 

La main de l’enfant se tend

vers une ombre qui la prend

La main d’un homme se tend

vers une ombre qui la prend

Nous marchons nous marchons…

Plaignez le long troupeau des hommes

toujours précédés de leurs ombres

 

Des mains de l’enfant nouveau-né

l’enfant mûri prend le témoin

qu’il donne à l’homme de demain

et l’homme trouve devant lui

son moi vieilli qui lui succède

d’autres effigies de lui-même

jusqu’au vieillard du dernier cri

Nous marchons, nous marchons…

plaignez le lent troupeau des hommes

toujours précédés de leurs ombres

le lent troupeau qui loin se fond

et toujours prêt se renouvelle

le Temps l’efface à l’horizon

mais l’enfant germe l’enfant germe

Nous marchons nous marchons

plaignez le lent troupeau des hommes

toujours précédés de leurs ombres…

L’enfant crie qu’il ne veut pas vivre

et l’homme aussi crie dans l’enfant

et tous les cris s’oublient en cris

dans la marche du mouvement…

Nous marchons nous marchons

plaignez le lent troupeau des hommes

toujours précédés de leurs ombres

la main se tend un homme tombe

et l’absent devient un enfant

qui vient bientôt combler le vide…

Le jour s’en va coiffé de nuit

la nuit s’en va coiffée de jour

nous marchons nous marchons

plaignez le lent troupeau des hommes

toujours précédés de leurs ombres…

Des mains de l’enfant au berceau

l’enfant mûri prend le témoin

qu’il donne à l’homme de demain

et l’homme trouve devant lui

son moi vieilli qui lui succède

d’autres effigies de lui-même

jusqu’au vieillard du dernier cri…

Nous marchons nous marchons

plaignez le lent troupeau des hommes

toujours précédés de leurs ombres

car vient le temps des mains tendues

vers une ombre qu’on ne voit plus

On a porté se transformant

de relayeur en relayeur

le don malingre de la vie

mais vient le temps où l’ombre est morte.

(1960)

 

Questions de ma chatte

 

A quoi penses-tu ma Siamoise

à la fois lionne et biche et chatte

en statue figée dans la grâce

au seuil de l’éternel silence

dans les rigueurs de l’Absolu ?

 

Présente entre deux absences

tes yeux me fixent longuement

dans leur attentive fierté

d’être deux étoiles bleu-de-mer

douées du pouvoir de parler.

 

Que tu puisses devenir squelette

toi si pure et si magnifiée

est une injuste conséquence

des faims domptées de la Nature

dans la création condamnée.

 

Au rythme sournois de l’usure

nous glissons dans la pénitence

de la déchéance imposée

et nos yeux s’éteindront bientôt

sans avoir saisi la lumière.

 

Si les saisons se renouvellent

de quel hiver notre printemps

pourrait-il espérer renaître ?

Qui viendra justifier nos vies

dans la nuit soudain décisive ?

 

Face au regard tendu vers moi

de ma siamoise en attente

d’une explication de la vie

je n’ai qu’un sourire pour réponse.

Pour moi la VIE fut un voyage

qui va bientôt se terminer.

(10 novembre 1992)

 

 

Fin de règne

 

Parfois j’entends venir à moi

les tintamarres lointains d’un bal

qui cherchent à me cerner

 

Bouffées de nuit bouffées de jour

elles déferlent

 

Chancelant je ne suis plus

que le corps usé d’un vieil arbre

assailli par le vent

 

D’autres fois

le tumulte s’apaise

dans le murmure d’un aveu

qui glisse telle une caresse

au long sillon de mon sang

et mon corps accepte l’appel

 

Je m’imprègne de la fatigue

d’un nageur au bout de l’effort

qui mollement s’affaisse

dans la faillite du repos

La pulsation des images

ne fait plus chanter le silence

Je deviens feuille morte

chagrin des fleurs fanées

agonie des braises

éclair trop vite aboli

 

L’infini se confond

L’immensité me dépeuple.

En moi la vie devient

la silhouette d’un passant

qui n’a plus de mémoire.

 

Sur l’horizon je flotte

peuplé de désirs malsains

Le vide en moi se réfugie

 

Mes rêves sont fleuris de seins

dont les pointes en forme d’arme

m’interdisent la possession

 

Je ne suis pourtant qu’une proie docile

pour l’ambition des tendres mains

qui voudraient calmer mes alarmes

 

Mais tout n’est vraiment qu’illusions

 

Très lentement je m’achemine

vers le cimetière des envies

dans l’impuissance à féconder

les fleurs charnelles de la vie

 

Ce n’est plus qu’un corps endeuillé

qui fatalement s’achemine

vers la tombe du verbe aimer

Mon sang vainqueur s’est endormi.

(1991)

 

 

Jugement dernier

 

Qui donc m’attend, le Diable ou Dieu ?

L’étoile au bout du môle

qui plonge dans la mer scintillante une épée

verte ici et là-bas tremblante

une épée rouge

Est-ce toi, jugement dernier ?

 

Que me veut-on ?

Que me veut ce silence attentif à ma vue ?

N’étais-je pas mort-né dès l’origine ?

Les voix du sang

et celles des passés triomphants

criaient en moi depuis longtemps ma mort.

 

Qui donc est là, le Diable ou Dieu ?

 

Devant moi

la Vie devient-elle créancière ?

Mais que puis-je donner que je n’aurais reçu ?

La fin est toujours à recommencer.

 

Chinoises qui marchiez sur des moignons

vers des jongleurs d’étoiles,

Négresses qui tendez vos lèvres

transformées en sébiles,

Lépreux aux clochettes de honte,

Infirmes hypertrophiés de la douleur

et vous des camps maudits de la concentration

mes foules vivantes de squelettes

qu’allez-vous recevoir en échange ?

Quel Diable ou quel Dieu

vous ouvrira ses bras ?

 

Tous ces bonheurs passés à la tondeuse

ces promesses aux mains coupées

ces visages peuplés d’horreur

 

ces vagabonds dépouillés

qu’allez-vous en faire ?

 

Ils ne surent pas donner du poids à la fumée

car vous les avez créés superfétatoires

imparfaits, dangereux, dominateurs

nus dans le doute et les nécessités de vivre

 

Quel Diable ou quel Dieu viendra les justifier ?

 

Au pays noir où l’avenir est sans visage

que pouvons-nous attendre ?

Dieu a le Diable en Lui.

 

Dieu est un grand malade.

 

(1992)

 

 

Tu n’emporteras rien avec toi

 

Homme,

qui que tu sois

tu n’emporteras rien

avec toi.

 

Homme inhumain par habitude

ou par conviction,

Abel façonné par la vie

en Caïn pour les carnages,

quand donc jetteras-tu

tes masques de peinturlures

tes lauriers de prédateur ?

 

Tu n’emporteras rien

avec toi

 

Rien n’était urgent dans la vie

mais tu fus toujours pressé d’écraser

quiconque se mouvait dans d’autres couleurs.

 

Couleurs de peau, couleurs d’idées,

couleurs de tous les drapeaux coupables,

couleur des uniformes truqués.

 

Tu n’emporteras rien avec toi

 

Iraniens, Irakiens, qu’espérez-vous

sur vos champs puants de pétrole ?

Israéliens, Palestiniens,

n’étiez-vous pas du même sang ?

 

Et vous mes Africains,

mes rois nègres, mes nomades

des sables quadrillés par les Blancs

pourquoi jaillir en ennemis

hors du feu chantant de vos danses ?

Vous n’emporterez rien

avec vous.

 

O mes peaux Rouges de l’enfance

mes Arméniens de la vengeance,

peuples bafoués et méprisés

et vous ! coffres-forts de l’aisance

vous n’emporterez rien

avec vous.

 

Est et Ouest dressés

en face à face dérisoire

où donc prenez-vous vos points cardinaux ?

 

Vous n’emporterez rien

avec vous.

 

Policiers et soldats victimes

des voix de l’anonymat,

peuples mal soumis des usines

et vous, mes clochards de la vie

vous n’emporterez rien avec vous.

 

Hommes déchirés de races

et de convictions ennemis,

Hommes drogués, saoulés d’argent

dans la fermentation des convoitises,

qui donc pourrait vous pardonner

dans l’au-delà ?

 

Vous n’emportrez rien

avec vous.

 

Que tu sois né du Christ ou de Lénine

de Mahomet ou de Bouddha

ou d’un ventre mal défini

tu n’emporteras rien

avec toi.

(1990)

 

 

 

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