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UN AMI : PIERRE BÉARN

par Pierre Devarenne

 

 

Je venais de terminer l’écriture d’ « Un éclat de rire jaune » et comme je cherchais un préfacier, il me vint l’idée de solliciter Pierre Béarn dont l’édition originale des « Dialogues de notre amour » venait de m’être offerte.

Je tentais ma chance en lui adressant mon manuscrit, et là où les « grands » écrivains opposent le silence ou au mieux une réponse condescendante selon laquelle ils sont trop sollicités pour accepter de répondre favorablement. Pierre Béarn m’écrivit pour me donner son accord mais à une seule condition : celle de me rencontrer à Paris.

Petit écrivaillon de province, encore à la recherche d’un éditeur, j’étais touché par un tel intérêt.

Un rendez-vous était pris aussitôt dans un café proche de la rue Monsieur-le-Prince où était situé son domicile.

Le souvenir de cette première rencontre reste gravé dans ma mémoire comme le caractère des lettres sur papier alfa ou vélin.

Pierre Béarn m’apparut avec ses yeux à la lueur océane, la casquette vissée à la façon des marins bretons.

J’avais cette prémonition que ce voyageur dans l’imaginaire était un navigateur toujours en partance.

J’appris plus tard qu’à 20 ans Il s’était engagé dans la marine nationale, qu’il rejoignit Constantinople avec le cuirassé Jean Bort, qu’il commanda en 1940 un chalutier d’évacuation à Dunkerque, qu’il participa à une expédition en Afrique et qu’il sillonna le monde… ; que tel qu’en lui-même, son oeuvre aux titres évocateurs « L’océan sans espoir », « Couleurs d’ébène », « Couleurs de mer », « Cram-cram du Niger », préférait Ies chemins de traverse aux sentiers battus.

Lors de cette première rencontre, la géographie guida nos propos. Mes origines maternelles et poitevines nous conduisirent sur les traces du poète Maurice Fombeure né à Jardres près de Poitiers, qu’il avait rencontré à Paris ; mes origines paternelles et champenoises l’amena à m’entretenir pêle-mêle de ses mêmes ascendances, de l’Association des Ecrivains de Champagne à laquelle Il avait participé aux côtés de son président-fondateur Henri Vendel, bibliothécaire et créateur du bibliobus, et surtout de son aîné de trente ans, le rémois Paul Fort. Il semblait porter une affection toute particulière à l’auteur des Ballades Françaises dont il avait fait la présentation dans l’ouvrage qui lui est consacré aux Editions Seghers dans la collection des Poètes d’aujourd’hui. Il me confia que leur attache était telle qu’il acheta à sa veuve sa propriété de Montlhéry.

Quelques semaines après cette conversation, je recevais la préface tant attendue qu’il qualifiait de « courte mais sincère » et qu’il datait du 25 juin 1991.

Nos contacts auraient pu trouver ici leur épilogue. Il n’en fût rien.

Nos rencontres suivantes eurent lieu à l’occasion du Mandat des Poètes, sorte de fondation qu’il créa et anima pendant 49 ans pour venir au secours d’écrivains en difficulté. Ce fut en 1999 que le dernier « mandat » fut décerné au siège de la Société des Gens de Lettres.

Je me souviens de cet échange lorsque Pierre Béarn, rappelant sa carrière de fabuliste, fut amicalement et successivement traité dans l’assistance d’homme à fables, d’homme affable et d’homme à femmes… Ces compliments semblaient lui convenir à ravir I

La soirée se termina au restaurant et au moment où je prenais congé, Pierre Béarn, l’air grave, m’interpella : « Je vais avoir besoin de vous ». En cet Instant, il ne s’adressait pas à son confrère en poésie mais à l’avocat.

C’est ainsi que s’échangèrent entre nous et jusqu’aux derniers instants de sa longue vie de jeune centenaire une correspondance fournie mi-professionnelle et mi-littéraire, où furent évoquées ses préoccupations familiales, sa volonté de préserver son oeuvre et de pérenniser l’Association des Amis de Pierre Béarn grâce au dévouement et à la ténacité sans faille de Brigitte Béarn-Egger, son souci de protéger ses droits d’auteur sur le slogan "métro-boulot-dodo", extrait de son recueil « Couleurs d’usine » paru aux Editions Seghers en 1951 et que reproduisent sans vergogne les annonceurs, les publicitaires et les chanteurs de tout poil… Chacun de ces envois était accompagné de petits dessins faméliques reproduisant des bonhommes aux allures de Don Quichotte.

Pierre Béarn m’offrit en mal 2002 une seconde préface pour « Morceaux choisis ». Il y défendait, une poésie humaine c’est à dire écrite à la fois en chair et en clair, à l’opposé « dès morceaux de prose découpés à la va comme je te pousse » de la plupart des poèmes qui circulent actuellement dans les revues.

De tels propos étaient à son image : un homme aimant les choses simples de la vie, la bonne chère, le verre de vin qui accompagnait chacun de ses repas, les femmes, les arts et les lettres, la mer et le désert, détestant la fourberie, la laideur, le racisme, l’injustice, la violence et ayant choisi avec bonheur le meilleur moyen pour le dire : la littérature !

 

Pierre Devarenne

 

 

 

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